Décembre 2010
En 1975 Joseph Pouget - aujourd'hui disparu -, sensible à la dégradation progressive du patrimoine architectural du haut val de Loire, décida de tout mettre en œuvre pour enrayer ce phénomène. C'est ainsi qu'il créa LIGER (la Loire, en latin), association qui a pour but la sauvegarde et la valorisation de l'architecture des fermes traditionnelles couvertes de genêt et de lauzes ainsi que des paysages du Pays des sources de la Loire.
Un inventaire des fermes effectué dans les années 1980 indiquait que les pailhisses - chaumières aux toitures couvertes de genêt - étaient un peu plus d'une centaine, disséminées sur les hauts plateaux du Vivarais. La Montagne, comme la désignent les habitants des autres zones de l'Ardèche, était alors la seule région d'Europe à posséder des habitations permanentes couvertes de genêt. Ces chaumières étaient des centaines au début du XXe siècle mais moins de dix aujourd'hui dressent encore leur toit pointu vers le ciel. 
Chaumière au toit de genêt dans la vallée du Gage
En 1980, l'association devint propriétaire de la ferme de Clastre, à Sainte-Eulalie, autrefois prieuré non conventuel dépendant de l'abbaye vellave de Saint-Chaffre du Monastier. L'habitation - le queyrat, en patois local - est couverte de lauzes alors que le fenil possède une traditionnelle toiture en genêt. Cette ferme de Clastre est d'autant plus emblématique qu'elle reste la dernière chaumière au sein d'un village ardéchois. Classée monument historique en 1984, sa toiture a connu plusieurs campagnes de restauration.
La ferme de Bourlatier, sur la commune de Saint-Andéol de Fourchades, avec une façade dépassant les cinquante mètres, possède une magnifique toiture en lauze. Cédée par son propriétaire en 1987 à l'association Liger, elle fût restaurée en quatre ans avec le concours du Conseil Général de l'Ardèche, la fondation d'entreprise Colas et la Société de Sauvegarde des monuments anciens. En 1988, les travaux de rénovation valent à Liger le premier prix de l'émission " Chefs d'oeuvres en péril ". Louée au département de l'Ardèche, les travaux se sont
poursuivis, permettant des animations
culturelles diversifiées : conférences,
concerts et diverses expositions. 
Clastre, à sainte-EuIalie
Pour perdurer, les toitures couvertes de genêt doivent être rénovées chaque année, au sortir de l'hiver mais aussi et surtout à l'automne, comme le faisaient tous les propriétaires de pailhisses autrefois. Une campagne de rénovation de fond est donc aujourd'hui nécessaire pour assurer une pérennité aux dernières chaumières couvertes de genêt, dont celle de Clastre à Sainte-Eulalie, qui risque de disparaître. Cette intervention structurelle nécessite un investissement conséquent. La récente création du Fonds de dotation Liger est en ce sens une excellente initiative, qui permettra de recevoir des donations, dont 66% du montant sera déductible pour les donateurs. Les fonds ainsi recueillis permettront certes la réfection totale de la toiture de Clastre et à moyen terme, la sauvegarde d'autres bâtisses traditionnelles du haut val de Loire, comme cela est inscrit dans ses statuts.
Liger cherche aussi à sensibiliser et à informer le plus grand nombre sur la variété du patrimoine de la Montagne du Vivarais et ce, au travers d'animations variées : des stages d'apprentissage de pose de lauzes ou piquage de genêt sur les toitures traditionnelles ; la mise en oeuvre en 2011 d'un journal pour informer sur les activités de l'association, tout en traitant également de sujets de fond ; et enfin, un jardin ethnobotanique, dénommé l'Hort de Clastre.
Depuis longtemps avait germé l'idée d'une animation autour du jardin de Clastre, devant la façade principale du bâtiment, mais aussi dans la vaste prairie qui s'ouvre à côté. Plusieurs membres de Liger ont ainsi proposé de mettre en valeur ces espaces, pour redonner à la vénérable pailhisse l'écrin qu'elle mérite, à travers un jardin de plantes médicinales - les simples - et présentation de plantes spontanées de la Montagne. Ce jardin associera culture, connaissance et compréhension de la région. Le visiteur pourra y prendre conscience de la richesse de notre patrimoine naturel ainsi qu'apprécier, goûter et cuisiner les richesses naturelles du pays des sources de la Loire. Il y découvrira les noms et usages vernaculaires des plantes locales ainsi que les emplois cosmétiques et médicinaux des cueillettes traditionnelles. Ce jardin permettra l'organisation d'activités culturelles centrées sur la flore locale mais aussi des expositions, des stages botaniques, culinaires ou de phytothérapie. Au-delà de ce renouveau de Liger et de toutes les belles initiatives qui l'accompagnent, nous lançons un cri d'alarme : " les chaumières au toit de genêt du haut val de Loire sont en passe de disparaître ! ". Deux d'entre-elles se sont encore écroulées l'hiver dernier, sous le poids de la neige et les coups de buttoir de la Burle- le vent violent qui souffle du nord lorsqu'il neige - et surtout, l'abandon par leurs propriétaires, qui n'ont pas les moyens de sauver leur toit de genêt.

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Chaumière an toit de genêt, hameau de la Macharade. Sagnes et Goudoulet, en 1998
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La même chaumière, en 2010
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II est temps d'arrêter ce phénomène inexorable et de fixer, pour les générations futures, cette architecture qui fut celle de nos ancêtres, depuis que l'homme s'est sédentarisé, il y a bien longtemps, sur les hautes terres de l'Ardèche.
Vous êtes ainsi tous invités à adhérer à l'association Liger et à participer au fonds de dotation récemment créé, pour sauvegarder la beauté des paysages des hauts plateaux de l'Ardèche et préserver son patrimoine unique.
Laurent HAOND Président de Liger Décembre 2010
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